Par Patrick Ferguson ,
vice-président principal, Solutions d’assurance captive de Marsh
03/08/2024 · Lecture de 5 minutes
Dans le contexte actuel des risques, les entreprises canadiennes font face à une abondance d’occasions et de défis. Bien que l’assurance des entreprises offre des solutions pour gérer certains de ces risques, les entreprises peuvent aussi décider d’auto-financer leurs risques, en partie ou en totalité.
Parmi les options d’auto-financement des risques offertes aux entreprises canadiennes : l’assurance captive. Une captive peut contribuer à protéger le bilan de l’entreprise tout en conservant de la souplesse dans l’établissement des programmes et en donnant lieu à des économies potentielles.
Depuis le 1er juillet 2022, les entreprises canadiennes sont en mesure de former des captives d’assurances domiciliées en Alberta, ce qui leur offre une deuxième option nationale pour accéder à des solutions de financement de risques non traditionnels qui permettent de réduire les coûts d’assurance et d’améliorer la couverture.
L’assurance captive est un mécanisme de financement des risques dans lequel une entreprise s’assure contre les sinistres futurs. On estime qu’il s’agit d’un véhicule de risques non traditionnel, car c’est une forme d’auto-assurance. Au lieu de contracter de l’assurance commerciale sur le marché, une société décide de conserver une partie de ses risques au sein de sa propre captive d’assurances en propriété exclusive. En intégrant les captives à leur stratégie de financement des risques, les sociétés en tireront probablement divers avantages. Il peut s’agir de réaliser des économies sur les primes sur le marché de l’assurance des entreprises par rapport à l’historique des sinistres actuel, de créer de la souplesse à l’égard du placement global dans le programme d’assurances et de permettre l’accès aux marchés des réassurances pour accroître davantage la capacité d’assurance globale.
Les entreprises qui créent des programmes d’assurance captive ont la capacité de financer des garanties traditionnelles, comme l’assurance responsabilité civile générale, l’indemnisation des accidentés du travail, la responsabilité civile automobile, l’assurance de biens et les avantages sociaux des employés, ainsi que les risques difficiles à assurer, y compris les risques environnementaux et les cyberrisques.
Contrairement aux primes d’assurance des entreprises, les tarifs des captives sont établis en fonction du profil de risque de l’entreprise plutôt qu’en fonction des événements survenant dans l’industrie à l’échelle mondiale. Par exemple, en raison des sinistres causés par les catastrophes naturelles survenues dans d’autres régions du monde, comme les ouragans en Floride, les tarifs des primes d’assurance de biens des entreprises canadiennes ont souvent augmenté au cours des dernières années. En mettant en place une captive, une entreprise qui présente un bon profil de risque, qui ne subit pas de pertes importantes et qui a mis en place de solides programmes de gestion de la sécurité et des risques peut réduire au minimum ses coûts liés aux primes et récolter des avantages financiers. Au cours des années sans pertes catastrophiques, plutôt que de générer un excédent qui se répercute sur le bénéfice net d’une compagnie d’assurance des entreprises, la société peut plutôt conserver ou réinvestir les profits de la captive dans l’ensemble de la société mère.
Jusqu’au 1er juillet 2022, la Colombie-Britannique offrait le seul régime de captive national du Canada. Les entreprises canadiennes domicilient également leurs captives dans des régions extracôtières, le plus souvent à la Barbade, suivie des Bermudes et des îles Caïmans. En particulier pour les entreprises dont les activités sont purement canadiennes, l’Alberta offre une nouvelle option nationale qui peut offrir des avantages par rapport à d’autres territoires, en particulier les domiciliations extracôtières.
Bien que les domiciliations extracôtières puissent offrir des avantages économiques plus importants pour les risques non canadiens en raison des conventions fiscales ou des accords d’échange de renseignements à des fins fiscales en place, il peut être plus facile pour une entreprise de convaincre son conseil d’administration et ses hauts dirigeants d’établir une captive dans une province canadienne. Les membres du conseil d’administration peuvent entretenir une perception négative de la création d’une société extracôtière et avoir le sentiment que le fait de rester au pays leur paraît beaucoup mieux. De plus, rester au Canada simplifiera probablement la coordination des déplacements et des réunions du conseil.
Pour les sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) qui souhaitent ajouter une captive à leur structure d’assurance pour le risque canadien, il peut être extrêmement avantageux de pouvoir être domicilié au Canada. À la fin de 2022, le gouvernement fédéral du Canada a instauré des modifications fiscales qui englobent les primes d’assurance versées aux captives qui sont établies à l’étranger. Ces changements peuvent entraîner un fardeau fiscal supplémentaire pour les risques canadiens assurés dans les captives de ces territoires extracôtiers. Par exemple, les SPCC qui font appel à une captive extracôtière pour gérer leurs risques intégralement canadiens peuvent se voir imposer le double du taux imposé à celles qui restent au Canada.
Bien que la Colombie-Britannique offre un autre territoire aux entreprises qui cherchent à établir leur domiciliation au pays, cette option pourrait ne pas s’avérer viable. Les entreprises seront probablement confrontées à des fardeaux réglementaires et à de longs délais de délivrance de concession de licences.
À l’inverse, l’Alberta affiche une forte motivation à être une véritable solution alternative à la Barbade, aux Bermudes et aux îles Caïmans, en considérant le secteur des captives comme un domaine de croissance et une priorité. L’organisme de réglementation est réceptif et les délais de concession de licences ne sont que de cinq semaines en moyenne. Étant donné que les discussions au sujet des captives découlent souvent de réunions axées sur la stratégie de renouvellement, les organisations ont habituellement des contraintes de temps quant au temps qu’il faut pour que leur captive soit en place et opérationnelle. Maintenant que les entreprises constatent que l’organisme de réglementation de l’Alberta respecte régulièrement ce délai de cinq semaines, elles peuvent avoir l’assurance qu’elles obtiendront leur licence à une date précise.
L’Alberta devrait bientôt dépasser la Colombie-Britannique en tant que domicile de captives le plus important au Canada. Au cours de ses 18 premiers mois d’exploitation, l’Alberta a déjà concédé 17 permis d’exercice à des captives, ce qui est rare, peu importe le territoire. À titre de comparaison, la Colombie-Britannique a adopté ses premières lois sur les captives en 1988 et compte moins de 25 captives.
À court terme, on s’attend à ce que l’Alberta continue de concéder des permis d’exercice aux captives à un rythme semblable. Les entreprises canadiennes sont traditionnellement conservatrices lorsqu’il s’agit d’explorer d’autres véhicules de financement des risques, d’où l’intérêt d’avoir un domicile national comme l’Alberta. À plus long terme, l’Alberta fera probablement preuve de plus de créativité et élargira sa législation pour inclure davantage de couvertures d’assurance. À l’heure actuelle, la législation albertaine ne permet pas le financement des risques, de l’assurance vie et des avantages sociaux des employés par des tiers, ce qui oblige les entreprises canadiennes qui s’intéressent à ce genre de captives à chercher à l’étranger.
À mesure que la province concédera des permis d’exercice à un plus grand nombre de captives, l’un de ses plus grands défis consistera à équilibrer la surveillance réglementaire et la réceptivité. Le nombre de captives augmentant, l’Alberta sera-t-elle en mesure de continuer à fournir le service et les délais réglementaires auxquels les clients et les courtiers s’attendent?
L’Alberta sera par ailleurs soumise à des forces extérieures, comme la volatilité des marchés de l’assurance et de la réassurance des entreprises. Même si ces marchés ont été difficiles et même si on constate des baisses de tarifs et une hausse de la capacité à l’avenir, cela pourrait avoir une incidence directe sur le nombre de sociétés qui décident de créer leurs captives. Dans cette optique, un autre défi sera de maintenir la croissance des nouvelles captives à mesure que le domicile se développe et que les marchés évoluent.
Peu importe la taille ou le secteur d’exploitation d’une société, une captive peut être un outil puissant pour prendre le contrôle total du risque, tout en obtenant une plus grande souplesse et une meilleure protection financières. Pour en savoir plus sur la façon dont une captive peut profiter à votre entreprise, communiquez avec votre représentant Marsh.