Par Matthew Kendle ,
Administrateur délégué, Construction, infrastructure et cautionnement
10/27/2023 · Lecture de 7 minutes
Les événements météorologiques extrêmes sont de plus en plus fréquents. D’ici 2030, il pourrait y avoir quatre fois plus d’épisodes caniculaires, deux fois plus de sécheresses et les tempêtes de pluie extrêmes pourraient augmenter de 50 %, selon le Groupe intergouvernemental sur les changements climatiques.
Par ailleurs, ces événements sont de plus en plus graves. Alors que les événements extrêmes ont augmenté de plus de cinq fois entre 1970 et 2019, le coût des événements extrêmes à l’échelle mondiale a augmenté de près de huit fois pendant la même période, selon les données de l’Organisation météorologique mondiale (OMM).
Cela équivaut à une augmentation du coût par événement de près de 77 % (ajusté en fonction de l’inflation) au cours des cinq dernières décennies.
Tandis que les projets de construction deviennent plus audacieux en matière d’échelle et de géographie, et que le nombre de catastrophes météorologiques augmente, les exigences de veille juridique et commerciale liées aux risques climatiques et à la façon de les gérer s’accroissent.
Les conditions météorologiques imprévisibles ont une incidence sur les délais et les budgets de construction. Des études démontrent que chaque année, les événements météorologiques défavorables (comme les inondations et les chutes de neige) retardent 45 % des projets de construction à l’échelle mondiale, ce qui représente des milliards de dollars en dépenses supplémentaires et en pertes de revenus. De plus, pour chaque hausse de 1 ºC des températures au-delà de 28 ºC, la productivité des travailleurs de la construction peut diminuer jusqu’à 57 %, selon un rapport de l’Air Force Institute of Technology.
En outre, les entreprises de construction peuvent faire face à des risques inconnus liés aux changements climatiques dans leurs chaînes d’approvisionnement. Les dommages physiques causés par des événements à risque physique aux installations des fournisseurs, à l’infrastructure publique et aux réseaux de transport peuvent entraîner de longs retards et avoir une incidence sur les revenus commerciaux et les calendriers de livraison des projets.
Afin de conserver un avantage concurrentiel et de garder la capacité de fonctionner dans ces conditions, il est recommandé aux entrepreneurs de prendre des mesures pour comprendre, caractériser et traiter ces risques et améliorer leur résilience.
La gravité croissante des conditions météorologiques extrêmes au fil du temps aura aussi une incidence sur les bâtiments du futur. S’ils ne sont pas pris en compte, les changements pourraient dépasser les tolérances liées au climat établies au moment de la conception.
L’atténuation des changements climatiques et l’adaptation à ces derniers doivent faire partie intégrante du processus de conception. Les matériaux de construction à faible teneur en carbone et une conception efficace contribuent à atténuer les effets supplémentaires sur le climat.
Les considérations relatives à la séparation des bâtiments, à la qualité des fondations, à l’élévation, aux matériaux combustibles, ainsi qu’aux tolérances au vent et à la chaleur doivent tenir compte de l’environnement d’aujourd’hui, mais aussi de l’environnement le plus extrême que l’avenir pourrait offrir.
De plus, en ce qui a trait aux projets plus importants et plus complexes, où un calendrier de construction peut s’étendre pendant une décennie ou plus, les projections de changements climatiques devront être intégrées aux phases de construction et de mise en service, et à la durée de vie prévue de l’actif terminé.
En outre, l’intégration de l’efficacité thermique à la conception du bâtiment va au-delà de la simple « résilience dès la conception ». Cela réduit également l’empreinte carbone de l’actif et pourrait réduire l’intensité énergétique du bâtiment pour les locataires et les résidents, le rendant ainsi plus attrayant dans des scénarios de coûts énergétiques élevés comme l’aggravation de la précarité énergétique, l’augmentation du coût de la vie et la sécurité énergétique incertaine. Par ailleurs, les locataires commerciaux s’attendent de plus en plus à ce que les bâtiments à faible teneur en carbone respectent leurs engagements de carboneutralité, de sorte que la conception de bâtiments thermiquement rentables peut également améliorer leur valeur à long terme.
Les entreprises de construction et les organismes de l’industrie commencent déjà à aborder ces problèmes en développant des bassins de données, des techniques analytiques et des outils visant à soutenir les considérations de conception avant-gardistes. Toutefois, bien que ces outils deviennent de plus en plus efficaces pour gérer les risques physiques, ils omettent souvent l’assurabilité des actifs dans le contexte d’un climat changeant.
La recherche de conseils relatifs aux implications en matière d’assurance des prévisions de changements climatiques dès que possible dans les phases de faisabilité et de conception d’un actif peut aider à réaliser des économies importantes et à éviter un dérapage budgétaire.
Effets sur les travaux physiques
Par ailleurs, les effets des changements climatiques devront être davantage pris en compte pendant le travail physique. On s’attend à ce que les changements climatiques entraînent des précipitations d’intensité accrue, un déplacement vers le pôle des tempêtes tropicales et une plus grande variation des journées extrêmement chaudes et extrêmement froides.
Les vents accrus affectent les opérations de levage et le travail en hauteur. La chaleur extrême et les conditions de sécheresse ont une incidence sur les risques associés aux travaux à chaud. Le changement des nappes phréatiques affecte l’excavation, le creusement de tunnels et la vulnérabilité d’un site aux inondations. Il convient de tenir compte de l’entreposage de l’usine, de l’équipement et des matériaux sur place, particulièrement s’ils sont vulnérables aux intempéries avant l’installation. Par exemple, le bois lamellé-croisé peut être particulièrement vulnérable aux conditions humides, ce qui signifie que l’entreposage des matériaux doit impérativement être pris en compte.
Les changements climatiques peuvent devoir être intégrés à la planification à long terme des projets complexes de grande envergure qui peuvent s’étaler sur plusieurs décennies. L’évolution à la hausse possible des températures moyennes pourrait avoir une incidence sur la durée de vie du processus de construction.
Cependant, pour la plupart des projets, la gestion des risques climatiques consistera essentiellement à surveiller les conditions, à élaborer des mécanismes d’alerte rapide, à s’assurer que les sites et les processus sont résilients et réactifs aux événements extrêmes et que les personnes sont protégées.
Ici encore, une approche axée sur les données est essentielle. Un courtier d’assurances et un conseiller en gestion de risques informés et solidaires peuvent contribuer à garantir que cette analyse est intégrée aux programmes de transfert de risques et aux recommandations d’atténuation, ce qui peut ainsi réduire les risques de construction et optimiser l’assurabilité et la réussite d’un projet.
Par-dessus tout, les risques posés aux travailleurs par l’incidence et la gravité accrues des conditions météorologiques doivent être compris et atténués.
Une exposition extrême à la chaleur et au soleil peut entraîner une déshydratation, des étourdissements, un évanouissement et un coup de chaleur. Les inondations et les chutes de neige peuvent également causer des retards, car les sites sont alors inaccessibles et les travailleurs font face à des problèmes de sécurité potentiels à leur retour au travail. Le travailleur de chantier est donc en première ligne de tous ces dangers et peut subir les effets les plus graves d’une mauvaise gestion de ces risques.
L’intégration des évaluations météorologiques en temps réel et à venir dans la planification de la santé et de la sécurité est de plus en plus importante. Elle est aussi plus faisable, grâce à l’avènement d’outils réactifs et dynamiques de formation et de suivi des risques élaborés à ces fins. L’industrie de la construction reconnaît déjà largement l’importance de placer la sécurité de la main-d’œuvre au cœur de toutes ses activités. Elle peut donc montrer la voie en ce qui a trait à la protection de ses employés contre les dangers liés aux conditions météorologiques de l’avenir.
Pour gérer efficacement les risques, il est essentiel de comprendre le risque des changements climatiques et des événements météorologiques extrêmes. La modélisation des répercussions physiques des changements climatiques peut aider les entrepreneurs à mettre en place des pratiques globales et adaptées de gestion des risques conçues pour éviter ou réduire les préjudices aux employés et pour s’assurer que les actifs sont résilients dès leur conception, réduisant ainsi les possibilités de dérapage des projets et, finalement, assurant la construction durable des actifs.
Les entreprises doivent collaborer avec un courtier d’assurances qui a de l’expérience en construction et de l’expertise en matière de risques physiques associés aux conditions environnementales extrêmes. Grâce à leur expertise commerciale, scientifique et technique combinée, les courtiers expérimentés peuvent être particulièrement utiles pendant les périodes de resserrement des conditions d’assurance, comme le démontrent les dernières années sur le marché de l’assurance de la construction.
Par exemple, le bon courtier peut aider en effectuant une évaluation détaillée des risques climatiques d’un site et en recommandant des mesures de résilience appropriées à mettre en place, dans le cadre de la conception d’un projet planifié ou pendant la phase de construction. En gérant les risques de cette façon, les titulaires d’une police peuvent être mieux à même de fournir des renseignements détaillés sur les risques en réponse à l’examen plus approfondi des assureurs et, en fin de compte, à améliorer les conditions d’assurance.
Pour obtenir une assurance adaptée à leurs projets, les décideurs doivent commencer à travailler avec leurs courtiers dès que possible. Cela peut aider à mettre en place un programme d’assurance [judicieux], soutenu par une approche de gestion des risques conçue pour minimiser la probabilité et les répercussions d’un sinistre.