Par Prakash Patel ,
Responsable mondial de l’ingénierie des risques liés à l’hydrogène
07/30/2024 · Lecture de 5 minutes
L’utilisation de l’hydrogène comme source de combustible pourrait libérer de nouvelles occasions d’améliorer la sécurité énergétique et d’atténuer les effets du changement climatique. Exploité à grande échelle dans le futur, l’hydrogène séduit notamment par son potentiel de décarbonation des industries, des transports et de la production d’électricité, qui sont difficiles à réduire. Toutefois, pour utiliser l’hydrogène à l’échelle mondiale, il faut disposer d’une infrastructure suffisante pour le transporter et le stocker en toute sécurité.
Aujourd’hui, la majeure partie de l’hydrogène est comprimée et transportée par des pipelines, dont les coûts d’exploitation sont faibles et qui ont fait leurs preuves. Des travaux sont en cours à l’échelle mondiale pour développer et innover dans d’autres solutions de transport et de stockage afin de faire face aux augmentations prévues des volumes d’hydrogène et aux longues distances qu’il devra parcourir. Outre les pipelines, d’autres options pour le transport de l’hydrogène peuvent inclure l’ammoniac liquide, l’hydrogène liquide ou les liquides organiques porteurs d’hydrogène. Actuellement, il n’existe pas de méthode universelle et rentable de transport et de stockage de l’hydrogène. Les diverses méthodes offrent des avantages différents et présentent toutes un certain niveau de risque, étant donné que l’hydrogène et ses dérivés nécessitent des contrôles pour permettre leur manipulation en toute sécurité. Par conséquent, les options de transport et de stockage doivent faire l’objet d’une évaluation minutieuse des risques.
Dans un avenir proche, lorsque les quantités ou les distances d’échange d’hydrogène deviendront plus importantes, les méthodes les plus viables qui pourraient permettre son transport sont l’ammoniac, l’hydrogène liquide et les liquides organiques porteurs d’hydrogène (Liquid Organic Hydrogen Carrier – LOHC).
L’ammoniac est l’une des options les plus intéressantes pour transporter l’hydrogène sur de grandes distances, et ce pour plusieurs raisons :
Cependant, malgré ces facteurs, le processus de « craquage » qui décompose l’ammoniac en hydrogène consomme beaucoup d’énergie, ce qui entraîne une perte d’énergie potentielle de 13 % à 34 %. Des développements futurs et des démonstrations à grande échelle pourraient rendre ce processus plus efficace.
De plus, comme l’ammoniac est toxique, des risques spécifiques s’appliquent à son transport et à son stockage. Les opérateurs doivent respecter strictement les réglementations et les procédures de sécurité pour éviter toute fuite susceptible de nuire à la santé publique ou à l’environnement, ou de provoquer des incendies et des explosions dans des circonstances très précises. L’ammoniac n’est pas considéré comme une substance inflammable.
Si l’hydrogène liquide est une option sûre pour l’environnement car il n’est pas toxique, son transport et son stockage peuvent être techniquement complexes en raison de son inflammabilité et de sa basse température. Le processus de liquéfaction nécessite de grandes quantités d’énergie, et, une fois produit, l’hydrogène liquide doit être conservé à une température inférieure ou égale à -253 ºC, ce qui nécessite des cuves spécialisées pour le stockage et le transport.
En 2022, le projet Hydrogen Energy Supply Chain (chaîne d’approvisionnement en hydrogène) a fait la démonstration de la première livraison mondiale d’hydrogène liquéfié. Fort de cette expérience, le projet prévoit construire un transporteur d’hydrogène à l’échelle commerciale d’ici le milieu des années 2020.
Un LOHC est un liquide capable de stocker et de libérer de l’hydrogène par réaction chimique, ce qui le différencie de l’hydrogène liquide (qui n’est lié chimiquement à aucune autre substance). L’hydrogène transporté à l’aide d’un LOHC est relativement peu coûteux et sécuritaire, étant donné qu’il n’est pas nécessaire de le comprimer et que les actifs existants peuvent être utilisés pour le stocker. Les LOHC sont stockés dans des conditions ambiantes et se comportent de la même manière que les combustibles liquides conventionnels dérivés du pétrole.
Pour progresser avec les LOHC, il peut être nécessaire de mettre au point d’autres LOHC qui répondent à plusieurs critères, comme la stabilité thermique et chimique, une toxicité relativement faible et une grande capacité de stockage de l’hydrogène.
Le transport de l’hydrogène comprimé par l’intermédiaire de pipelines, qu’ils soient nouvellement posés pour l’utilisation de l’hydrogène ou qu’il s’agisse de gazoducs existants, est une autre option. Cette méthode pourrait constituer une option moins coûteuse pour l’acheminement de grandes quantités d’hydrogène dans des régions comme l’Amérique du Nord, l’Europe et la Chine, mais les conduites fabriquées en acier au carbone à haute résistance peuvent être sensibles à la fragilisation par l’hydrogène. Une évaluation minutieuse et des études techniques des pipelines existants peuvent être nécessaires pour déterminer si un réseau est adapté au transport à long terme de l’hydrogène. La modernisation des pipelines peut être difficile, mais elle est possible.
D’autres risques pour les conduites d’hydrogène sont connus et peuvent comprendre la corrosion externe, la fragilisation par l’hydrogène, les dommages accidentels (causés par le creusement, par exemple), l’exposition à des dangers naturels, le vandalisme, le sabotage et l’impact des véhicules.
L’hydrogène comprimé peut être utilisé comme carburant de remplacement dans l’industrie automobile et des transports. Par exemple, les voitures électriques à pile à combustible sont alimentées par de l’hydrogène comprimé qui alimente une pile à combustible.
Une fois l’hydrogène produit et traité, il peut être nécessaire de le distribuer et de le stocker. L’hydrogène a une teneur énergétique élevée en poids, mais pas en volume, ce qui peut représenter un défi particulier pour le stockage. Comme pour les différentes méthodes de transport, l’hydrogène peut être stocké physiquement sous forme gazeuse ou liquide. De même, chaque méthode de stockage présente des avantages et des limites. Outre les différences de coûts, les températures et les pressions de fonctionnement, la capacité et l’évolutivité sont des considérations importantes.
En raison de son point d’ébullition très bas, l’hydrogène liquide nécessite des cuves très bien isolées pour un stockage sécuritaire et efficace. L’hydrogène gazeux nécessite des solutions à haute pression pour le stockage et le transport afin d’atteindre une densité énergétique proche de la rentabilité de l’hydrogène liquide.
Une autre option consiste à utiliser un liquide organique porteur d’hydrogène (LOHC), c’est-à-dire des composés qui se lient chimiquement à l’hydrogène et le libèrent par le biais de réactions chimiques.
L’une des préoccupations souvent soulevées est la fragilisation par l’hydrogène, c’est-à-dire que les tuyaux et les cuves peuvent devenir cassants en présence d’hydrogène. Toutefois, les causes de fragilisation et les mesures d’atténuation sont bien comprises par l’industrie. La sélection de matériaux résistants à la fragilisation par l’hydrogène réduit ce risque, et l’utilisation éventuelle de revêtements protecteurs peut protéger de la perméation de l’hydrogène.
L’hydrogène peut être un pilier important de la future politique énergétique. À mesure que l’utilisation de l’hydrogène augmente, les options actuelles de transport et de capacité de stockage s’étendront probablement et contribueront à stimuler l’utilisation de l’hydrogène dans divers secteurs industriels.
L’accent étant mis aujourd’hui sur la compréhension de la façon dont les problèmes techniques et de sécurité sont gérés dans la production, le transport et le stockage de l’hydrogène, ainsi que sur la façon dont différentes options peuvent être mises à l’échelle, il existe une demande accrue de marchés de l’assurance pour aider à protéger les organisations dans ce domaine.
L’économie de l’hydrogène comporte de nombreux risques connus, notamment les propriétés physiques et chimiques propres à l’hydrogène, ainsi que des risques émergents qui peuvent découler de la mise à l’échelle ou des risques d’investissement des précurseurs. Les occasions et les défis liés à l’expansion de l’hydrogène nécessiteront une analyse et une surveillance continues afin d’améliorer la compréhension par les parties prenantes du profil de risque des projets liés à l’hydrogène.
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10/11/2024